193. Et cuidez-vous que je me joue !
« Et croyez-vous que je me moque! »
Chanson médiévale, France. Tirée du Manuscrit de Bayeux (XVe siècle).
Et cuidez vous que je me joue ! (Intro.) Et que je vouloisse aller En Engleterre de mourrer ; Ils ont une longue coue ! Et cuidez vous que je me joue ! 1. Entre vous gens de village Qui aymez le roy françoys, Prenez chascun boun courage Pour combattre les Engloys ; Prenez chascun une houe Pour mieux les desraciner ; Et s'ils ne s'en veullent aller, Au moins faictes leur la moue ! Et cuidez vous que je me joue ! 2. Et ne craygnez point à les battre, Ces godons, panches à poys ; Car ung de nous en vault quatre, Au moins en vault il bien troys ; Affin qu'on les esbaffoue, Autant qu'en pourrés trouver, Faictes au gibet mener, Et qu'en nous les y encroue ! Et cuidez vous que je me joue ! 3. Par Dieu ! Se je les empoigne, Puisque j'en jure une foys, Je leur montreray sans hoigne, De quel pesant sont mes doigts ; Ils n'ont laissé porc ne oue ! Tout entour nostre cartier, Ne guerne ne guernelier, Dieu mette mal en leur joue ! Et cuidez vous que je me joue !
Traduction en français (approximative):
Et croyez-vous que je m’amuse ?
Et que je veux aller mourir en Angleterre ?
Ils ont une longue queue ! (= ils sont couards)
Et croyez-vous que je m’amuse ?
Entre nous, villageois qui aimez le Roi français,
Armez-vous de courage pour combattre les Anglais !
Prenez chacun une houe
Pour mieux les déraciner, et s’ils ne veulent pas s’en aller
Au moins faites-leur la moue !
Et croyez-vous que je m’amuse ?
Et ne craignez pas de les battre
Ces rosbifs, [pantalons ???] à pois
Car un de nous en vaut quatre, au moins, il en vaut bien trois
Afin qu’on les bafoue (= méprise sans pitié)
Autant que vous pourrez en trouver, faites-les mener à la potence
Et qu’on les y accroche !
Et croyez-vous que je m’amuse ?
Par Dieu, si je les empoigne, puisque j’ai juré de le faire une fois
Je leur montrerai sans difficulté de quel pesant sont mes doigts
Ils n’ont pas laissé un porc ni [un mouton / une oie ???]
Autour de notre quartier, plus une poule, plus un poulailler !
Que Dieu leur fasse mal à la joue ! (= leur donne une gifle ???)
Et croyez-vous que je m’amuse ?