225. La Fille au Roi Louis

Chant ancien, France. Traditionnel (XVe – XVIe siècle).
Cette version est arrangée par Lucius Barde (2024).

1. Le roi Louis est sur son pont,
Tenant sa fille en son giron ;
Elle voudrait bien se marier
Au beau Déon, franc chevalier.

2. — Ma fille, n'aimez jamais Déon,
Car c'est un chevalier félon ;
C'est le plus pauvre chevalier
Qui n'a pas vaillant six deniers.

3. — J'aime Déon, je l'aimerai,
J'aime Déon pour sa beauté,
Plus que ma mère et mes parents,
Et vous, mon père, qui m'aimez tant.

4. — Ma fille, il faut changer d'amour,
Ou vous entrerez dans la tour.
— J'aime mieux rester dans la tour,
Mon père, que de changer d'amour.

(parlé)
5. — Et vite, où sont mes estafiers,
Mes geôliers, mes guichetiers,
Qu'on mette ma fille en la tour :
Elle n'y verra jamais le jour.


6 - Elle y fut bien sept ans passés
Sans que personne la pût trouver.
Au bout de la septième année,
Son père vint la visiter :

7. — Bonjour, ma fille, comment vous va ?
— Hélas, mon père, il va bien mal :
J'ai un côté mangé des vers,
Et les deux pieds pourris ès fers.

8. Mon père, avez-vous de l'argent,
Cinq à six sous tant seulement ?
C'est pour donner au geôlier,
Qu'il me desserre un peu les pieds.

(parlé)
9. — Oui-da, ma fille, nous en avons,
Et des mille et des millions :
Nous en avons à vous donner,
Si vos amours voulez changer.


10. — Avant que changer mes amours,
J'aime mieux mourir dans la tour.
— Eh bien ma fille, vous y mourrez,
De guérison point vous n'aurez. »



11. Le beau Déon, passant par là,
Un mot de lettre lui jeta ;
Il y avait dessus écrit :
« Bell', ne le mettez en oubli ;

12. Faites-vous morte ensevelir,
Que l'on vous porte à Saint-Denis ;
En terre, laissez-vous porter,
Point enterrer ne vous laisserai. »

(parlé)
13. La belle n'y a pas manqué,
Dans le moment a trépassé ;
Elle s'est laissé ensevelir,
On l'a portée à Saint-Denis.


14. Le roi va derrière en pleurant,
Les prêtres vont devant chantant :
Quatre-vingts prêtres, trente abbés,
Autant d'évêques couronnés.


15. Le beau Déon passant par là :
— Arrêtez, prêtres, halte-là !
C'est m'amie que vous emportez,
Ah ! laissez-moi la regarder !

16. Il tira son couteau d'or fin
Et décousit le drap de lin :
En l'embrassant, fit un soupir,
La belle lui fit un sourire.

17. — Ah ! voyez-vous la trahison
De ma fille et du beau Déon !
Il les faut pourtant marier,
Et qu'il n'en soit jamais parlé.

18. Sonnez, trompettes et violons,
Ma fille aura le beau Déon.
Fillette qu'a envie d'aimer,
Père ne l'en peut empêcher !

19. Quatre ou cinq de ces révérends
Se mirent à dire, tout haut riant :
||| : Nous sommes venus pour l'enterrer,
Et nous allons la marier ! : |||

Source : Henri Davenson, « Le livre des chansons », p. 187

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